Dans le groupe “FIDIC Contracts” sur LinkedIn, la question suivante a été soulevée au sujet de l’évaluation des offres EPC. J’ai trouvé ce sujet extrêmement intéressant parce qu’il montre quelques idées sous-jacentes récurrentes sur les contrats EPC ; merci beaucoup à la personne qui l’a soulevé :

Un appel d’offres pour la construction d’une station de dessalement a été lancé sur la base d’un contrat EPC avec une procedure à deux enveloppes, mais les offres reçues sont basées sur des technologies et des fabrications différentes. L’employeur estime maintenant que cette soumission aurait dû être faite sur une procédure en deux étapes – deux enveloppes car les systèmes offerts dans chaque offre reposent essentiellement sur des technologies différentes. Peuvent-ils convertir maintenant cet appel d’offres, inicialement en une seule étape, en deux étapes sur la base d’une technologie sélectionnée ? Ou faire un nouvel appel d’offres ? Votre avis est demandé.

Philosophie EPC

Le sujet ci-dessus montre comment les employeurs se heurtent souvent à la philosophie EPC lors de l’évaluation des offres EPC. Ils veulent appliquer la philosophie EPC pour sa répartition des risques : Ils cherchent à transférer le maximum de risques à l’entrepreneur. Toutefois, ils hésitent à évaluer les offres EPC reçues. Ils préfèrent comparer des “pommes avec des pommes” plutôt que de faire une évaluation plus complexe avec plusieurs variables : prix + rendement + délai des travaux + coûts de l’O&M (opération et maintenance) + etc.

Appliquer la philosophie EPC sans enthousiasme est une recette vouée à l’échec. Les projets EPC sont toujours des projets complexes. L’art de les faire fonctionner correctement ne réside pas seulement dans le fait de laisser l’entrepreneur EPC supporter une plus grande partie des risques. Il faut aussi lui permettre d’optimiser le projet en fonction de ses idées et compétences. Nous avons déjà publié sur ce sujet dans ce blog :

Comment faire pour évaluer un appel d’offres EPC ?

Voici ma réponse à la question posée ci-dessus :

Dans le cadre d’un appel d’offres pour un contrat EPC, le Constructeur devrait être libre de choisir la technologie dans la mesure où elle respecte les exigences du Maître de l’ouvrage. Les “Prescriptions de l’Employeur” (ou la spécification fonctionnelle ; “Employer’s Requirements” en anglais) devraient être fonctionnelles plutôt que prescriptives. Je suppose que c’était le cas ici parce que différents soumissionnaires ont pu présenter des offres conformes avec différentes technologies.

La partie importante de ces Prescriptions de l’Employeur sont les garanties de performance. Pour une usine de dessalement, il s’agit probablement de la quantité d’eau douce produite par période de temps (en m3/h) avec une certaine qualité d’eau.

Le Maître de l’ouvrage devrait évaluer les offres qui satisfont ou dépassent les exigences minimales du Maître de l’ouvrage en fonction de leur prix, les garanties de performance réelles et tout autre critère d’évaluation établi (comme les coûts de fonctionnement et de maintenance). Lors de l’évaluation des offres EPC, le personnel du Maître de l’ouvrage a souvent peur de faire cela avec des solutions techniques différentes. Ils aimeraient que les offres soient techniquement uniformes et qu’elles soient évaluées en fonction du prix. Cela va totalement à l’encontre de l’esprit d’un contrat EPC.

Processus d’évaluation des offres EPC à une seule étape et à deux enveloppes

Alors, comment évaluer correctement les offres EPC (en citant toujours ma réponse sur LinkedIn) ?

Personnellement, je suis en faveur de la solution à une seule étape et à deux enveloppes. Étapes à suivre :

  1. Vérifier le respect des critères minimaux de performance ;
  2. Pour les soumissions qui passent l’étape 1, quantifier la solution technique en fonction des critères de performance, p. ex. quantité d’eau douce produite par période de temps, énergie consommée par le traitement, effluents, durée des travaux, etc. Le dossier de chaque soumissionnaire devrait recevoir une évaluation monétaire pour chacun de ces critères (p. ex. combien vaut un mois pour une période de construction plus courte) ;
  3. Ce n’est qu’après avoir terminé l’étape 2 qu’il faut procéder à l’ouverture des enveloppes de prix afin que l’évaluation des performances techniques ne soit pas biaisée par les prix (c’est-à-dire éviter une évaluation biaisée pour les critères techniques, car les écarts de prix sont déjà connus) ;
  4. Le soumissionnaire retenu est celui qui a la solution optimale de prix + critères de performance évalués sur une base quantitative.

Les choses à ne pas faire ?

Ce que l’employeur ne devrait certainement pas faire :

Il serait injuste pour les soumissionnaires de transformer ce processus maintenant en un processus en deux étapes. Surtout lorsqu’il s’agit de permettre aux soumissionnaires d’adapter leur solution technique à celle préférée par le Maître de l’ouvrage. Préférée après avoir pris connaissance des propositions des entrepreneurs… En outre, il est probable que cela aboutira à l’attribution du contrat à un entrepreneur qui n’avait pas l’intention de mettre en œuvre la solution technique choisie. C’est probalement parce qu’il la connait moins bien. Et cela conduit très souvent à sous-évaluer le prix d’une solution technique et au “succès” durant la deuxième étape. Comme nous le savons tous, il ne faut pas chercher les problèmes sur les projets complexes (comme les usines de dessalement).

Je connais plusieurs entrepreneurs, spécialisés dans les contrats EPC, qui seraient horrifiés par cette situation. Ils investissent des sommes importantes dans la préparation d’une offre EPC optimisée. Ils ne peuvent pas accepter que leurs bonnes idées soient mises sur la table et que tous les concurrents puissent les utiliser. Je suppose que ces entrepreneurs EPC compétents refuseront tout simplement de participer à un tel appel d’offres.

Quelle est votre opinion à ce sujet ? Nous vous invitons à nous faire part de vos commentaires ci-dessous.

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Catégories : EPC

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